• Postérités

    Les œuvres vouées à la postérité sont celles qui traversent les époques, qui rencontrent plusieurs générations de lecteurs, les œuvres qui ont toutes les qualités pour vivre un siècle en prenant de jolies rides.

  • Pot-Bouille Zola Bibliolingus

    Pot-Bouille

    (tome 10 des Rougon-Macquart)

    Émile Zola

    Éditions Georges Charpentier

    1882

     

    Encore une fois, je me suis régalée avec Pot-Bouille, le tome 10 des Rougon-Macquart ! Cette fois, il utilise le registre de la comédie dramatique pour tailler un costard à la bourgeoisie et petite bourgeoisie parisienne du Second Empire (1851-1870) et dénoncer l’antagonisme des classes. Mais, au-delà de cette critique acerbe, c’est surtout la violence envers les femmes qui a retenu toute mon attention.

    « Eau et gaz à tous les étages, mon cher1. »

    Octave Mouret, 22 ans, quitte sa ville natale de Plassans (tome 4) pour s’installer à Paris. Grâce à Campardon, un ami de ses parents, il obtient une chambre dans un immeuble récent et cossu dans la rue de Choiseul, dans le 9e arrondissement, près du futur Opéra Garnier. 

    Campardon, qui y habite lui-même, lui fait la visite de tous les étages. Il répète à l’envi que les familles qui vivent dans l’immeuble sont respectables, honnêtes, éduquées. Tant et si bien qu’on se permet très vite d’en douter…

    Octave est prévenu : il lui est interdit de ramener des femmes...

    « La cour s’enfonçait, triste et propre, avec son pavé régulier, sa fontaine dont le robinet de cuivre luisait. Et toujours pas un être, pas un bruit ; rien que les fenêtres uniformes, sans une cage d’oiseau, sans un pot de fleurs, étalant la monotonie de leurs rideaux blancs. Pour cacher le grand mur nu de la maison de gauche, qui fermait le carré de la cour, on y avait répété les fenêtres, de fausses fenêtres peintes, aux persiennes éternellement closes, derrière lesquelles semblait se continuer la vie murée des appartements voisins2. »

    « C’était une paix morte de salon bourgeois, soigneusement clos, où n’entrait pas un souffle du dehors3. »

    Avec Octave, le fil rouge du roman, on s’introduit dans la vie intime des familles de l’immeuble, liées entre elles par M. Vabre, le vieux propriétaire de l’immeuble. Autour du grand escalier d’une « sévérité bourgeoise4 », c’est toute une « pot-bouille » qui se livre : au XIXe siècle, ce terme désigne une cuisine ordinaire de maison, l’équivalent de la « popote » aujourd’hui.

    Mais on se rend vite compte que, derrière l’apparence respectable, chaste et calme, les bourgeois·es se déchirent, manigancent tout le temps pour obtenir l’héritage du père, négocier des mariages juteux, prendre des amant·es…

    « Moi, lorsque j’ai eu vingt sous, j’ai toujours dit que j’en avais quarante5… »

    Il y a Mme Josserand qui crève d’ambition, de jalousie et d’humiliation. Elle rêve de donner de grosses réceptions comme les Duveyrier, avec un piano et un chœur, mais doit se contenter de son mari trop honnête pour être carriériste et chercher l’argent où il se trouve. 

    Pour paraître plus riches qu’iels ne le sont, les Josserand vivent au-dessus de leurs moyens. De belles robes, de beaux meubles, quitte à manger chichement tous les jours !

    Mme Josserand est prête à tout pour trouver un bon parti à sa fille Berthe. Elle la traîne de réceptions en réceptions, la pousse dans les bras de tous les jeunes hommes bourgeois, en prétendant avoir une dot de 50 000 francs…

    « Mais, avant tout, veille sur ta fille, écarte d’elle le mauvais air, tâche qu’elle garde son ignorance6… »

    À l’image de Berthe, les femmes de la bourgeoisie ont pour seule perspective de trouver un bon parti, un mari riche et bien placé. Aucun mariage ne naît de l’amour, ils sont le fruit de tractations et de mensonges.

    Une jeune fille de la bourgeoisie doit être vierge, pure, inculte et coupée du monde extérieur. Dans cette « éducation de poupée7 », elle doit se garder de lire des romans qui pourraient exciter son esprit et d’écouter les conversations des adultes qui pourraient lui donner de « mauvaises idées ». 

    « Alors, par phrases brèves, [Mme Vuillaume] dit son plan d’éducation. L’honnêteté, d’abord. Pas de jeux dans l’escalier, la petite toujours chez elle, et gardée de près, car les gamines ne pensent qu’au mal. Les portes fermées, les portes closes, jamais de courants d’air, qui apportent les vilaines choses de la rue. Dehors, ne point lâcher la main de l’enfant, l’habituer à tenir les yeux baissés, pour éviter les mauvais spectacles. En fait de religion, pas d’abus, ce qu’il en faut comme frein moral. Puis, quand elle a grandi, prendre des maîtresses, ne pas la mettre dans des pensionnats, où les innocentes se corrompent ; et encore assister aux leçons, veiller à ce qu’elle doit ignorer, cacher les journaux bien entendu, et fermer la bibliothèque8. »

    C’est très explicite : pour survivre, pour devenir une « femme du monde9 », les femmes n’ont d’autre choix que de se marier, de se livrer à une « prostitution décente et permise10 » auprès de leur mari, ce qui contraste finalement peu avec Nana (tome 9). 

    Une fois mariées, elles doivent se soumettre à leurs devoirs conjugaux, cette « abominable corvée11 » à laquelle elles ne peuvent échapper, même si, comme Clotilde, son mari boutonneux la répugne. 

    « L’histoire entière de son mariage [celui de Berthe] revenait, dans ses phrases courtes, lâchées par lambeaux : les trois hivers de chasse à l’ homme, les garçons de tous poils aux bras desquels on la jetait, les insuccès de cette offre de son corps, sur les trottoirs autorisés des salons bourgeois ; puis, ce que les mères enseignent aux filles sans fortune, tout un cours de prostitution décente et permise, les attouchements de la danse, les mains abandonnées derrière une porte, les impudeurs de l’innocence spéculant sur les appétits des niais ; puis, le mari fait un beau soir, comme un homme est fait par une gueuse, le mari raccroché sous un rideau, excité et tombant au piège, dans la fièvre de son désir12. »

    « Quand un homme est brutal, c’est qu’il vous aime, et il y a toujours moyen de le remettre à sa place d’une façon gentille13… »

    Quant aux hommes, ils ne cessent de parler des femmes, qu’ils méprisent pourtant. Tous ces propriétaires, hommes d’affaires et hommes de loi, les veulent vertueuses et chastes, alors qu’eux-mêmes couchent à la moindre occasion. 

    « Et, si vous saviez, c’est poli, c’est frais, ça vous a une peau de fleur, avec des épaules, des cuisses pas maigres du tout, monsieur, rondes et fermes comme des pêches14 ! »

    Les femmes sont « expliquées, retournées, épluchées15 », traitées comme des bouts de viande, alors qu’eux sont moches, repoussants, malades. Certaines choses n’ont pas changé…

    « Vous êtes donc brutal comme les autres hommes, que rien ne satisfait, tant qu’on leur refuse quelque chose16. »

    Il y a ausi Octave lui-même, qui cherche une femme pour se trouver une bonne situation professionnelle, comme Léon avec Mme Dambreville. Octave est un jeune homme séducteur, cajoleur, mais manipulateur et brutal envers les femmes quand il s’agit de mettre en œuvre ses intérêts personnels. Probablement le plus gros queutard de tous !

    Octave trouve une place de commis dans la fameuse boutique de tissus Au bonheur des Dames, dont le succès éclatant et écrasant fera l’objet du tome suivant. Pot-Bouille est donc comme une intrigue préparatoire au Bonheur des dames qui a été écrit juste après !

    « Quand ils se sont craché à la figure, ils se débarbouillent avec, pour faire croire qu'ils sont propres17. »

    Mais, depuis l’escalier de service de cet immeuble cossu, il y a tout un monde que les bourgeois·es ignorent : les bonnes savent tout de la vie de leurs maîtres et maîtresses, elles se racontent tous les ragots. Dans la cour qui donne sur les cuisines des bonnes, c’est toute « une débâcle d’égoût, qui, chaque matin, se déversait là18 ».

    Les bourgeois·es méprisent les gens du peuple et nient toute leur humanité. Iels croient faire leur affaires et assouvir leurs « vices » dans la plus grande discrétion, comme si Adèle, Lisa, Françoise, n’avaient pas d’oreilles et d’yeux pour les observer. Elles ne sont bonnes qu’à cuisiner, faire le ménage — et se faire tirer un coup de temps à autre, sans jamais en assumer les conséquences.

    Mais le plus grand mépris des bonnes vient certainement de M. Gourd, le concierge : il hait profondément les gens de sa classe sociale qui ne s’en sortent pas comme lui. Maintenant qu’il n’a plus à larbiner pour le duc de Vaugelade, il ne se sent plus péter. « Tourmenté d'une rage d’ancien domestique, qui se fait servir à son tour19 », il se permet de traiter les rares ouvrier·ères locataires et Mme Pérou, la femme de ménage, comme des sous-merdes.

    « [L’abbé Mauduit] jetait une fois encore le manteau de la religion sur cette bourgeoisie gâtée, en maître de cérémonie qui drapait le chancre, pour retarder la décomposition finale20. »

    Et enfin, dans tout ça, il y a l’abbé Mauduit et le docteur Juillerat, qui observent cette « bourgeoisie gâtée21 ». L’abbé Mauduit, qui confesse tous ces gens, ne cesse de passer l’éponge sur leurs bassesses et leurs « vices », tandis que le docteur Juillerat, profondément anticlérical et républicain, renouvelle ses attaques contre la bourgeoisie et l’éducation bornée donnée aux jeunes filles.

    « Selon [le docteur Juillerat], la bourgeoisie avait fait son temps ; elle était un obstacle sur le chemin de la révolution ; depuis qu’elle possédait, elle barrait l’avenir, avec plus d’obstination et d'aveuglement que l’ancienne noblesse22. »

    Mon avis

    Pot-Bouille, le tome 10 des Rougon-Macquart, est le pendant de L’Assommoir, qui décrit avec compassion la misère dans un immeuble du quartier populaire de la Goutte d’Or.

    Au contraire, Pot-Bouille se moque ostensiblement de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie. Dans ce roman de mœurs (souvent comique, ce qui est peu habituel chez Zola), il décrit leur hypocrisie, leur frilosité, leur quotidien fade et mesquin, leur obsession du pouvoir, de l’argent et de l’héritage. À l’inverse de L’Assommoir, la plupart des personnages sont détestables, et pourtant, comme toujours, j’ai pris un grand plaisir à le lire. C’est tout le talent de Zola !

    Mais, au-delà de la critique acerbe de la bourgeoisie du Second Empire et de la violence des classes, qui sont déjà en soi des sujets capitaux dans l’œuvre de Zola, c’est surtout la description de la violence envers les femmes qui a retenu toute ma attention : les femmes bourgeoises ne peuvent exister que par leur capacité à faire des enfants, et les femmes prolétaires sont exploitées toute leur vie. C’est justement cette dénonciation qui donne à ce roman une dimension particulièrement intéressante.

    Encore une fois, je me suis régalée avec Pot-Bouille ! Pour tout dire, j’ai lu et relu certains passages avec délectation, et pris 20 pages de notes et de citations !

    Du même auteur

    Tome 1, La Fortune des Rougon

    Tome 2, La Curée

    Tome 3, Le Ventre de Paris

    Tome 4, La Conquête de Plassans

    Tome 5, La Faute de l'abbé Mouret

    Tome 6, Son excellence Eugène Rougon

    Tome 7, L'Assommoir

    Tome 8, Une page d'amour

    Lisez aussi

    Irène Némirovsky La Proie

    Irène Némirovsky Le Bal

    Irène Némirovsky Le Maître des âmes

    Jean Meckert Les Coups

    Pot-Bouille

    (tome 10 des Rougon-Macquart)

    Émile Zola

    Préface d'André Fermigier

    Éditions Gallimard

    Collection Folio classique

    2022 (1982 pour le premier dépôt légal)

    592 pages

    8,30 euros

     

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  • une page d'amour émile zola bibliolingus

    Une page d’amour

    (tome 8 des Rougon-Macquart)

    Émile Zola

    Georges Charpentier

    1879

     

    Une fois de plus, je replonge dans l’univers de Zola ! Et quel plaisir de retrouver tout ce que j’aime chez lui. Une page d’amour, le tome 8 de la série des Rougon-Macquart, est probablement l’un des moins connus. Il met en scène Hélène Grandjean, une jeune veuve qui vit à Passy avec sa fille Jeanne âgée de 11 ans. En apparence, ce roman semble simple, moins violent que les autres, mais en fin de compte je l’ai trouvé très réussi et bien cruel. 

    « Une vraie sainte, un ange de paradis, et belle, si belle qu’on se mettrait à genoux dans les rues pour la voir passer1 »

    Hélène Grandjean vit à Passy avec sa fille Jeanne âgée de 11 ans. Depuis la mort de son mari, à leur arrivée à Paris, un an et demi plus tôt, Hélène vit recluse avec sa fille dans un bel appartement aménagé et décoré par son ami l’abbé Jouve. 

    Le luxe de cette vie bourgeoise citadine la heurte un peu, car Hélène est de la lignée des Macquart, la branche pauvre de la famille Rougon-Macquart. Elle est la fille d’Ursule Macquart et du chapelier Mouret, et la sœur de Sylvère (tome 1, La Fortune des Rougon) et de François Mouret (tome 4, La Conquête de Plassans).

    À cette époque, Passy n’est pas encore rattachée à Paris, mais la ville semble déjà, d’après le texte de Zola, très bourgeoise et aristocratique. L’opposition est nette avec l’immense succès qu’est L’Assommoir, le tome 7 paru quelques années avant, et qui se déroule dans les quartiers pauvres de La Chapelle dans le 18e arrondissement. Pour Zola, il s’agissait de montrer qu’il excellait aussi bien dans l’art de décrire le prolétariat que la bourgeoisie.

    De Paris, Hélène ne connaît rien du tout, elle ne sort que très rarement de chez elle. Mais Paris est un personnage à part entière du roman, car chaque jour, Hélène s’installe à sa fenêtre qui lui offre une vue plongeante de la ville. Ainsi, chaque description d’une saison à Paris fait écho à la vie intérieure d’Hélène.

    « Il faut me guérir, monsieur, n’est-ce pas ? Pour que maman soit contente… Je boirai tout ce que vous me donnerez, bien sûr2. »

    Une nuit, alors que sa fille Jeanne souffre d’une nouvelle crise de chloro-anémie, Hélène va à la rencontre de son voisin, le docteur Deberle. Cet épisode marque un tournant dans sa vie : peu à peu, elle visite les Deberle et entre dans leur intimité. Henri le médecin, son épouse Juliette, décrite comme une « jeune femme écervelée3 », bavarde, mondaine et versatile, « tourmentée du besoin de faire ce que tout le monde faisait4 », et le petit Lucien, aussi bien portant que Jeanne est malade.

    Jeanne, qui entre dans l’adolescence, semble souffrir de la même faiblesse héritée de son arrière-grand-mère, Adélaïde Fouque (tome 1, La Fortune des Rougon). La chloro-anémie, dans la littérature romanesque, touche les jeunes femmes vierges ; et, chez Zola, c’est l’une des manifestations des tares familiales héréditaires.

    Hélène semble se contenter de cette vie sage et solitaire, pleine de l’amour possessif, jaloux, exclusif de sa fille Jeanne. Depuis le décès de son mari, Hélène vit dans une paix tranquille et vertueuse, dans une honnêteté, une fermeté dénuées de toute passion. Elle occupe ses journées en compagnie des Deberle, elle se rend à leurs réceptions futiles, elle fait des visites de charité à la vieille Mme Fétu, elle se rend à la messe… Toutes les activités propres aux dames honorables, de « bonne éducation ».

    Mais son ami l’abbé Jouve l’enjoint à se remarier.

    « Aimer, aimer ! certes, elle aimait son enfant. N’était-ce point assez, ce grand amour qui avait empli sa vie jusque-là ? Cet amour devait lui suffire, avec sa douceur et son calme, son éternité qu’aucune lassitude ne pouvait rompre5. »

    Une page d’amour, un roman moralisateur ?

    J’ai beaucoup aimé lire Une page d’amour. Pour tout dire, j’ai littéralement fondu en larmes. L’intrigue, resserrée sur une poignée de personnages, est simple en apparence (et assez prévisible quand on connaît le goût terrible de Zola pour le tragique). Elle est organisée autour d’une armature faite de parties et de chapitres, à la fois très solide, très mathématique, et invisible si l’on n’y prend pas garde.

    J’aime le fait que Zola mette en avant beaucoup de femmes dans ses romans (Renée dans La Curée, Gervaise dans L’Assommoir, Nana, Denise dans Au Bonheur des Dames…), mais il leur réserve presque toujours des destins tragiques. Sur le thème de la passion impossible et conflictuelle, Zola soulève plusieurs interrogations. Qu’est-ce que l’amour ? Faut-il choisir entre le devoir d’élever son enfant et une relation amoureuse ? Comment « réagencer » sa famille après la perte d’un de ses membres ? 

    Une page d’amour est effectivement un roman bien cruel ! Est-il moralisateur ? Ou bien ne dénonce-t-il pas justement la moralisation ? Car, dans Une page d’amour, le désir d’Hélène est écrasé par la culpabilité, la résignation, les codes et les lois d’une bourgeoisie rigide, d’une Église qui codifie et aseptise toutes les relations. Je penche plutôt pour la deuxième option, car Zola écrit en réaction avec son époque : les années 1870-1880 et le retour à l’ordre moral, postérieur à la Commune de Paris. 

    Dans Une page d’amour, j’ai savouré la description critique du milieu bourgeois et aristocratique : les grandes réceptions pour parader et cancaner, les cérémonies à la messe qui ne sont finalement que des rendez-vous pour se donner bonne conscience et papoter, les visites aux pauvres qui sont des occasions de faire une « bonne action »… Ce milieu hypocrite, factice, vide, décrit à travers l’attitude et la physionomie des personnages, n’attire pas Hélène. 

    Dans ce roman, on n’échappe pas à l’habituelle scène orgiaque : lors du bal, les enfants, imitant à la perfection les « bonnes manières » de leurs parents, se goinfrent de choux à la crème (à l’instar des aristos dans La Curée, des pauvres lors du mariage de Gervaise dans L’Assommoir). Zola montre définitivement qu’il est aussi à l’aise avec les portraits des prolétaires que des bourgeois·es…

    Une page d’amour marque aussi par l’omniprésence de Paris. Paris n’est presque vu que depuis la fenêtre d’Hélène, mais il habite entièrement le roman, comme un compagnon qui est à la fois tranquillisant et indifférent — car, quoi qu’il arrive, il reste dans sa vie, là, immuable et changeant à la fois.

    Du même auteur

    La Fortune des Rougon, tome 1 des Rougon-Macquart

    La Curée, tome 2

    Le Ventre de Paris, tome 3

    La Conquête de Plassans, tome 4

    La Faute de l'abbé Mouret, tome 5

    Son excellence Eugène Rougon, tome 6

    L’Assommoir, tome 7

    La Terre, tome 15

    1. Page 61. -2. Page 181. -3. Page 170. -4. Page 172. -5. Page 92.

    Une page d’amour

    (tome 8 des Rougon-Macquart)

    Émile Zola

    Édition d’Henri Mitterrand

    Éditions Gallimard

    Collection Folio classique

    2021 (2018 pour la première parution dans la collection)

    414 pages

    9,20 euros

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